
La toiture verte du Target Center Arena à Minneapolis, MN : un exemple d’une toiture verte à large échelle qui offre des avantages en termes de gestion des eaux de surface, même dans un secteur urbain dominé par les surfaces imperméables. La toiture verte du Target Center Arena permet de retenir et d’évaporer près de 4 millions de litres par année. Image © Kestrel Design Group
Alors que les toitures vertes sont utilisées depuis 30 à 40 ans en Europe, la diffusion de cette technique est plus récente en Amérique du Nord. Le besoin de technologies à faible impact pour gérer les eaux météoritiques est une des principales raisons de ce développement.
Une toiture verte (aussi appelée toiture vivante ou toiture végétalisée) est constituée de végétation ainsi que d’un substrat de croissance, au-dessus d’une surface hautement imperméable et résistante aux racines, et inclut un système de drainage ainsi qu’une couche de filtration. Les toitures vertes peuvent poursuivre plusieurs buts intéressants, parmi lesquels retenir et filtrer l’eau de pluie, et remplacer les surfaces traditionnellement imperméables par des surfaces végétalisées perméables. En fonction des sites, de la capacité structurelle du toit ou du budget, la profondeur du substrat de croissance peut varier de quelques centimètres à plus de 30 cm. La végétation peut aller de plantes succulentes du genre Sedum, aux plantes herbacées indigènes, plantes vivaces, arbustes et arbres, voire même des cultures de légumes.
Comment les toitures vertes s’inscrivent-elles dans la panoplie des techniques à faible impact permettant de gérer les eaux de pluie? Examinons les coûts et bénéfices.

Toiture verte du Target Center © Kestrel Design Group
Le coût des toitures vertes commence à 150$ / m2, et dépend de plusieurs facteurs, tels que le type de substrat de croissance, la profondeur et la surface du toit. Le coût du premier gallon est le capital investi pour installer une structure de gestion de l’eau capable de traiter 1 gallon d’eau de ruissellement, et il s’agit de la méthode généralement utilisée pour évaluer le coût des structures de gestion de l’eau. On estime ainsi que, au coût de 150$ le m2, le premier gallon coûte entre 28$ et 35$, pour une toiture végétalisée extensive (15 cm ou moins de substrat).
Le coût du premier gallon pour une toiture verte est significativement plus élevé que celui de la plupart des autres structures de gestion des eaux de surface. En comparaison, on estime que les citernes coûtent entre 2$ et 5$ pour le premier gallon traité, et les arbres urbains entre 6$ et 8$. MAIS, malgré leur coût d’investissement et le prix par gallon élevé, une analyse des coûts et bénéfices en fonction du cycle de vie montre que les toitures vertes font encore sens d’un point de vue économique sur nombre de sites urbains. Comme la plupart des infrastructures de gestion de l’eau de ruissellement, la technologie des toitures vertes peut amener nombre d’autres avantages en plus de leur fonction hydrologique.
• Prolonge de 2 à 3 fois la durée de vie de la membrane d’étanchéité
• Redonne des eaux pluviales de qualité, en termes de volume et de propreté
• Rafraîchit par évaporation l’eau qui passe sur le toit
• Réduit les coûts énergétiques pour le chauffage et le refroidissement du bâtiment
• Améliore la qualité de l’air urbain, réduit la poussière et les niveaux de smog
• Diminue l’effet d’îlot thermique
• Permet une isolation sonore
• Améliore l’esthétique et fournit également des avantages psychologiques et économiques
• Constitue un potentiel pour l’agriculture / la production alimentaire urbaine locale et offre des espaces publics ouverts là où ce type d’espace n’est pas disponible au sol
• Favorise la biodiversité
Lorsqu’on additionne tous les coûts et bénéfices sur toute la durée de vie de la toiture, et qu’on les compare à ceux d’une toiture traditionnelle, le coût total de la toiture végétalisée est en fait plus bas, même si l’investissement de départ est plus conséquent.
Quels sont les sites et quelles sont les situations où les toitures vertes ont le plus de sens? Voici quelques exemples:
- Pour des propriétaires d’immeubles qui ont une vision de rendement à long terme et sont prêts à investir les coûts de départ importants.
- Lorsqu’il y a un besoin d’espaces collectifs, dans des situations où ces espaces ne sont pas suffisamment disponibles au niveau du sol: pour les jardins thérapeutiques, l’agriculture urbaine, les jardins d’hôpitaux, etc.
- Lorsqu’on souhaite améliorer l’esthétique et la vue, à la place de la vue sur une toiture bétonnée classique.
L’importance des effets bénéfiques en matière de rétention de l’eau par les toitures vertes dépend de beaucoup de facteurs, tels que la composition du sol et le substrat, les espèces de plante et leur diversité, la durée et l’intensité des pluies, aussi bien que des facteurs climatiques, parmi lesquels le vent, l’ensoleillement, ou encore les saisons. Elles sont plus efficaces pour des pluies fortes et brèves. Elles sont pour cela particulièrement recommandée dans le Midwest des Etats-Unis, où notre bureau, le Kestrel Design Group conçoit la plus grande partie de nos toitures vertes, que dans des climats européens où en général il pleut de manière plus fréquente et plus longue, et où les toitures n’ont pas autant le temps de sécher entre les pluies.

Toiture verte – Toronto
Pour améliorer l’efficacité dans la gestion des eaux météoritiques, les toitures vertes peuvent être combinées à d’autres structures de rétention:
La pluie qui n’est pas évacuée du toit peut être stockée et réutilisée, par exemple pour irriguer la toiture ou les espaces aménagés, rafraîchir le bâtiment, ou encore pour des usages intérieurs (évacuation des toilettes). Utiliser l’eau pour irriguer la végétation de la toiture fait sens dans les climats où les intervalles entre les pluies sont importants, comme dans de nombreuses régions du Midwest ou de l’ouest des Etats-Unis. De même, utiliser l’eau de pluie pour rafraîchir le bâtiment fait sens dans les climats secs et chauds
Selon Mankiewicz et McDonnell (2006), “quatre-cent litres d’eau correspondent à un centimètre d’eau sur une surface de 40 m2. L’évaporation d’une telle quantité d’eau équivaut à 18 tonnes d’air conditionné. A titre de comparaison, une pièce de 40 m2 a demande en général une tonne d’air conditionné, ainsi 400 litres d’eau pourraient fournir la puissance de rafraîchissement d’air nécessaire pour 650 m2 de plancher« .
Mêmes si elles génèrent des coûts, les avantages des toitures vertes sont clairs. On peut souhaiter en voir davantage dans nos villes.
Nathalie Shanstrom est Architecte de Paysage Durable auprès de Kestrel Design Group.
Article original en anglais sur Deeproot.com
Traduction Jean-Philippe Dind pour villedurable.org
Sources et informations complémentaires
Mankiewicz, P. and T. McDonnell. 2006. Sustainable Green Roof Design: Optimizing Water Budgets Through Wastes-Into-Resources Technologies In The Bronx. Conference Proceedings for Greening Rooftops For Sustainable Communities, Boston, MA.
POur plus de détails sur les bénéfices des toitures pour la gestion des eaux de pluie, voir:
Berghage, R., D. Beattie, A. Jarrett, C. Thurig, F. Razaei, AND T. O’Connor. 2009. Green Roofs for Stormwater Runoff Control. U.S. Environmental Protection Agency, Washington, D.C., EPA/600/R-09/026,
Carter, Timothy and C. Rhett Jackson. 2007. Vegetated roofs for stormwater management at multiple spatial scales. Landscape and Urban Planning. 80 (2007) 84–94
Compton, J. S., and T. H. Whitlow. 2006. A Zero Discharge Green Roof System and Species Selection to Optimize Evapotranspiration and Water Retention. Greening Rooftops for Sustainable Communities, Boston, MA, May 11-12, 2006.
Lundholm, J., MacIvor J.S., MacDougall, Z., Ranalli, M. 2010. Plant species and functional group combinations affect green roof ecosystem functions. PLoS ONE 5(3): e9677.
Peck, S., C. Callaghan, M. Kuhn. and B. Bass,. 1999. Greenbacks from Green Roofs: Forging a New Industry in Canada Status Report on Benefits, Barriers and Opportunities for Green Roof and Vertical Garden Technology Diffusion. Prepared for: Canada Mortgage and Housing Corporation March.
Wolf, Derek and Jeremy T. Lundholm, Water uptake in green roof microcosms: Effects of plant species and water availability, Ecological Engineering, Volume 33, Issue 2, 3 June 2008, Pages 179-186, ISSN 0925-8574, DOI: 10.1016/j.ecoleng.2008.02.008.
Simmons, M., B. Gardiner, S. Windhager, and J. Tinsley. 2008. Green roofs are not created equal: the hydrologic and thermal performance of six different extensive green roofs and reflective and non-reflective roofs in a sub-tropical climate. Urban Ecosystems. 11 (4) 339- 348. UR –http://dx.doi.org/10.1007/s11252-008-0069-4. DO – 10.1007/s11252-008-0069-4
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